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Terre Ceinte

Résumé du livre Terre Ceinte de Mohamed Mbougar Sarr, par Anne BIKIE SANA

Un livre de : Mohamed Mbougar Sarr

Terre Ceinte

Ajouté le : il y a 1 semaine

Ce roman prend vie à Kalep, une ville imaginaire créée par l’auteur.
Kalep est une ville contrôlée par le pouvoir brutal des islamistes. Ces derniers imposent des préceptes religieux à toute la population. Le livre débute d’ailleurs par une scène de violence : deux jeunes sont exécutés devant une foule pour avoir entretenu une relation amoureuse, ce qui serait contraire aux préceptes religieux.
Les mères de ces jeunes vont, au fil de la lecture, établir une correspondance secrète.

Dans cette ville, « La Fraternité » est le nom du groupe islamiste ayant pris le pouvoir. Avec eux est arrivé un régime dit religieux, qui prive purement et simplement les citoyens de leur liberté. Le meilleur moyen pour contrôler chaque individu est d’instaurer la peur.

Comme toujours dans l’histoire de l’humanité, un petit groupe de personnes encore lucides décide de s’opposer à ce régime au péril de leurs vies : Malamine, Dethié et sa femme Codou, Madjiguen Ngoné, Alioune, Père Badji ainsi que le Vieux Faye, qui accepte de mettre à disposition sa taverne pour des rencontres secrètes.

Ce groupe d’amis décide de mettre en place un journal clandestin. Ce journal a pour but de sensibiliser la population et de la sortir de sa torpeur. Ils espèrent que ce journal sera un outil qui permettra à chacun de penser à nouveau par lui-même, plutôt que de se laisser guider par la peur et de rester spectateur des horreurs sans pouvoir réagir.

Dans ce roman, « La Fraternité » parvient à installer un climat de totale soumission. Le langage et l’échange deviennent secondaires. La vie semble se résumer à suivre les règles établies, même si elles ne sont pas comprises, sont injustes, ou contraires aux principes de l’humanité, tant qu’elles sont justifiées par une parole dite sainte ou par l’usage de la force.

« Il trouvait étrange de n’avoir jamais parlé de ce qui se passait avec sa mère… Idrissa pensa qu’au fond, il était inutile de parler. Mais il savait que cette pensée était peut-être la plus grande victoire de La Fraternité : arriver à faire croire aux gens que parler était inutile et qu’elle pouvait parler à leur place, mieux exprimer leur pensée dans son propre langage. Et en les dispensant de parler, elle les dispensait aussi de penser… »

Ce groupe d’amis se réunit semaine après semaine dans cette taverne pour échanger autour des différents événements. Les dialogues sont magnifiques, car ils révèlent une véritable réflexion sur la société : la place de chacun, de nos croyances et de nos non-croyances, de notre facilité à abandonner nos droits au nom de la peur, de notre lâcheté, de notre égoïsme parfois. La place du peuple, sa force, sa faiblesse.

Pour moi, ce roman est une ode à l’espoir et à la force d’un peuple qui peut s’opposer et changer les choses. Il suffit à ce peuple de rester éveillé, attentif aux droits qui sont les siens et de les préserver jalousement. C’est également un rappel de l’importance d’une réflexion personnelle face à un groupe ou une situation. Il est normal, au sein d’une société, d’avoir des désaccords et des oppositions d’idées.

Au fil de la lecture, on apprend que lors de l’arrivée de La Fraternité, parée de leur auréole religieuse, ses membres s’attaquent à la culture : ils brûlent des livres et retirent tout ce qui permet et favorise une réflexion personnelle. Cela en dit long et fait écho à l’histoire du monde, à la façon dont les régimes autoritaires, peu importe leur idéologie, s’attaquent au savoir, à la connaissance et à l’éducation. La religion devient parfois une soupape pour justifier ces actes.

Ce roman aborde, selon moi, des sujets fondamentaux : la liberté d’un individu dans une société et l’importance de la préserver, l’accès à l’information et la nécessité de cultiver un esprit critique.
Terre Ceinte est, à mon sens, un défenseur de la liberté. Cette liberté, sans cesse remise en cause dans l’histoire de l’humanité, par des dogmes, des dictatures, ou des religions. Cette liberté galvaudée, retirée au nom de croyances ou de dogmes...

Elle prend plusieurs formes : celle de s’éduquer, celle d’apprendre, celle d’être informé, celle d’avoir un avis différent des autres, celle de croire ou de ne pas croire, celle d’agir selon nos propres convictions.

Ce roman doit tomber entre les mains des jeunes générations pour qu’elles réalisent à quel point la liberté est précieuse, et entre celles des parents, qui doivent faire preuve de courage pour échanger avec leurs enfants.